Procurations, transhumance et fraudes : l’UDB, grand gagnant du chaos électoral des législatives !

L’Union démocratique des bâtisseurs (UDB), sortie grande gagnante du premier tour des législatives du 27 septembre 2025 avec pas moins de 54 députés élus dès le premier tour sur une soixantaine, continue d’afficher une assurance déconcertante malgré l’ampleur des irrégularités dénoncées. C’est ce qui ressort de la conférence de presse tenue ce jeudi par le parti présidentiel à Libreville. Alors que l’opposition, des ONG électorales et même des alliés historiques comme le PDG parlent de fraudes massives, le parti présidentiel évite soigneusement d’en faire mention, préférant saluer des « victoires éclatantes ».

Mays Mouissi, secrétaire général de l’UDB et élu dès le premier tour dans la Dola (Ngounié, sud du Gabon) avec près de 67 % des voix, s’est félicité ce 2 octobre à Libreville de ce qu’il qualifie de « recomposition politique » majeure. Mais derrière ce discours triomphal, les accusations s’accumulent, notamment celle d’avoir financé à coups de millions le transport de milliers d’électeurs depuis Libreville vers sa circonscription, une manœuvre assimilée à une transhumance électorale interdite par le Code électoral.
Les fraudes passées sous silence
Ces pratiques, loin d’être marginales, s’ajoutent à un catalogue déjà fourni d’irrégularités rapportées : distribution tardive des cartes d’électeurs, listes d’émargement manquantes, absence d’isoloirs conformes, intrusion de candidats dans les bureaux de vote et délivrance massive de procurations douteuses. Dans plusieurs circonscriptions, ces dernières ont largement profité aux candidats UDB, leur assurant une avance confortable.
Une autre vue de la conférence de presse d’hier
Pourtant, l’Autorité de contrôle des élections et du référendum (ACER), le gendarme du scrutin, n’a relevé que « sept cas de dysfonctionnements » à l’échelle nationale. Une lecture minimaliste qui tranche avec la réalité documentée par de nombreux observateurs indépendants et qui accrédite l’idée d’un appareil électoral tournant à plein régime au service du parti présidentiel qui ne s’en plaint aucunement.
Le PDG hausse le ton
Le Parti démocratique gabonais (PDG), pourtant allié de l’UDB, a surpris par hier une déclaration ferme. Sa secrétaire générale, Angélique Ngoma, a dénoncé « des fraudes flagrantes » et conditionné la participation de ses candidats au second tour à un rétablissement de la transparence. Une prise de position qui contraste fortement avec le mutisme de l’UDB, visiblement satisfait de son butin électoral.
Cette attitude du PDG révèle un malaise plus profond : l’impression que le processus électoral a été dévoyé au bénéfice exclusif du camp présidentiel, quitte à fragiliser la confiance des citoyens dans la toute nouvelle Vème République. En refusant de dénoncer les irrégularités, l’UDB se place de facto en complice de pratiques contraires aux principes démocratiques.
Une démocratie en trompe-l’œil
Les partisans du pouvoir rappellent qu’en 2018, le PDG de l’époque avait décroché une majorité absolue dès le premier tour, ce qui, selon eux, justifierait aujourd’hui la dynamique victorieuse de l’UDB. Mais la comparaison ne tient pas : jamais les accusations de fraude n’avaient été aussi généralisées et aussi largement relayées par la société civile et sur les réseaux sociaux par des citoyens.
Le discours de Mays Mouissi, appelant simplement les électeurs hier en post de presse partisane au siège du parti à Okala, à « confirmer leur mobilisation » le 11 octobre, sonne comme une provocation pour l’opposition. En minimisant sciemment la gravité des faits, le SG de l’UDB transforme un scandale électoral en banal épisode politique, donnant l’impression que tout est permis dès lors que cela profite au parti présidentiel.
La victoire entachée
Ce silence volontairement entretenu par l’UDB en dit long. Le parti présidentiel, loin de prôner une démocratie apaisée, tire profit d’un chaos électoral qui fragilise durablement la légitimité des institutions et ce depuis le début du processus des rejets massifs des candidatures d’adversaires du parti présidentiel aux résultats désormais controversés. En refusant de reconnaître l’impact des fraudes, il s’impose comme le premier bénéficiaire d’un scrutin largement contesté.
Pour de nombreux analystes, cette posture enterre les espoirs d’un renouveau démocratique promis au lendemain de la transition et du coup de libération où désormais les électeurs ont droit à des scrutins douteux aux élus qui le sont tout aussi. L’UDB, censé incarner l’ère post-crise, s’illustre au contraire par une stratégie de conquête sans scrupules, où les irrégularités deviennent un levier de victoire plutôt qu’un problème à corriger.
@info241.com
