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Mirage présidentiel : Non, le Gabon ne deviendra pas Dubaï mais peut être Haïti !

Mirage présidentiel : Non, le Gabon ne deviendra pas Dubaï mais peut être Haïti !
Mirage présidentiel : Non, le Gabon ne deviendra pas Dubaï mais peut être Haïti ! © 2025 D.R./Info241

Dans une tribune au ton lucide et désabusé, la citoyenne gabonaise Nelly Matundu démonte, point par point, le mythe d’un « Gabon nouveau » promis par le président Brice Clotaire Oligui Nguema depuis son élection du 12 avril 2025. Derrière les discours triomphants et les symboles de modernité, elle décrit un pays enlisé dans les pénuries, la mise en scène et la résignation collective. Pour elle, le rêve d’un « Dubaï africain » n’est qu’un mirage : si rien ne change, le Gabon pourrait bien suivre la trajectoire d’Haïti, celle d’une nation autrefois pleine d’espoirs, aujourd’hui brisée par ses propres illusions.

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Les slogans ne suffisent pas à transformer un pays. Près de deux ans après son arrivée au pouvoir, la promesse de Brice Oligui Nguema de faire du Gabon un Dubaï africain s’effrite. Les routes restent défoncées, les hôpitaux débordent, les écoles manquent de tout, les foyers gabonais subissent des coupures d’électricité chaque jour s’étalant entre 4h et 6h par jour, l’eau au robinet est devenue une denrée rare, les gabonais vivant dans les grandes villes utilisent le système D pour s’approvisionner en eau, la société nationale est incapable de fournir de l’eau même dans la capitale Libreville.

Le pouvoir, lui, multiplie les cérémonies, les discours et les caméras.

Dubaï, elle, n’a jamais eu besoin de phrases ; elle a agi, méthodiquement, avec une vision.

Le Gabon, lui, brandi des slogans et est porté par le bruit et la ferveur.

Deux économies, deux mondes

Il faut bien l’admettre, le contraste est violent. Le PIB gabonais ne dépasse pas les 20 milliards de dollars, contre plus de 110 milliards pour Dubaï. Les investissements étrangers plafonnent à 1,1 milliard, quand les Émirats en attirent près de 30 milliards chaque année. Le tourisme, moteur de croissance dans le Golfe, reste anecdotique ici : 120 000 visiteurs au Gabon contre 19 millions à Dubaï.

Mais c’est sur le plan social que la différence devient abyssale.

En effet, les Émirats investissent 16 % de leur budget dans l’éducation, 8 % dans la santé, 8 % dans les retraites, et près de 40 % dans la cohésion sociale.

Le Gabon, lui, consacre à peine 2,2 % du PIB à l’éducation et 9,6 % du budget à la santé, soit environ 247 USD par habitant. Rajouter le pourcentage du budget gabonais dédié au social.

Deux visions s’opposent : là-bas, on mise sur les citoyens ; ici, on mise sur la façade mieux la mise en scène grotesque.

Dubaï, l’art de gouverner par méthode

Le “miracle” émirati ne doit rien au hasard. Là-bas, chaque décision s’inscrit dans un plan cohérent : infrastructures, universités, innovation, santé publique. Les autorités ont compris très tôt que la richesse durable ne se bâtit pas sur le pétrole, mais sur le savoir et la stabilité.

Les résultats parlent : un indice de développement humain parmi les meilleurs du monde arabe, une mortalité infantile réduite à 6 pour 1 000, et une population connectée à 99 %.

Un modèle fondé sur la rigueur, pas sur la mise en scène.

Libreville, capitale du symbole

Au Gabon, tout est rituel et surtout artificiel. Le général Brice Oligui Nguema multiplie les promesses, les prières publiques et les inaugurations. Les ministres applaudissent, les caméras filment. Mais l’État ne suit pas. Les réformes annoncées s’évaporent, les institutions restent engluées.

 Là où Dubaï planifie, Libreville improvise. Là où Dubaï construit des campus, le Gabon pose des pierres qu’on n’inaugure jamais deux fois. Le Gabon est dirigé non par une stratégie, mais par un calendrier d’événements.

Les chiffres de la dérive

La réalité économique est sans appel :

● Dette publique : 73,4 % du PIB en 2024, avec une projection à 76,2 % pour 2025.

● Déficit budgétaire : –3,7 % du PIB (Banque mondiale).

● Indice de corruption : 27/100 selon Transparency International (135ᵉ sur 180 pays).

● État de droit : 122ᵉ sur 142 selon le World Justice Project.

● Capital national par habitant : –34,7 % entre 1995 et 2020 (Banque mondiale).

Derrière ces chiffres, un constat : le pays s’appauvrit faute de rigueur mais surtout de volonté. Les ressources naturelles s’épuisent sans jamais enrichir la population depuis le coup d’État du 30 août 2023, Brice Oligui Nguema a désormais un bilan et on peut être fondé de lui demander « où est passé l’argent du Gabon ? »
 

Deux philosophies du pouvoir

À Dubaï, la gouvernance s’apparente à une mécanique de précision. Chaque institution a un rôle, chaque projet une finalité.

Au Gabon, le pouvoir se vit comme un exercice d’autorité.

Brice Oligui Nguema gouverne à l’instinct : plus de gestes que de cap, plus de promesses que de bilans.

Le pouvoir émirati est une administration du résultat ; le pouvoir gabonais, une administration du symbole.

L’école et l’hôpital, miroirs d’un pays

À Dubaï, les élèves étudient dans des écoles connectées, fréquentent des universités internationales, et bénéficient d’un système de santé performant.

Au Gabon, la salle de classe se transforme souvent en abri précaire : bancs cassés, tableaux fissurés, toilettes inexistantes, enseignants épuisés.

Les hôpitaux, eux, suffoquent : manque de médicaments, absence de matériels, personnel en sous-effectif,plateaux techniques inexistants, patients abandonnés dans les couloirs.

L’indice de capital humain plafonne à 46 %, preuve qu’un enfant gabonais ne développera jamais pleinement son potentiel.

Le Gabon pays du “presque”

Quand on parle du Gabon on le décrit quand on est honnête comme presque riche, presque moderne, presque réformé.

Le drame pour le Gabon est qu’il vit dans la promesse sans jamais la tenir ou plutôt qu’elle soit tenue.

Les grands plans économiques se succèdent mais sur le terrain, rien ne bouge.

En 2024, le Trésor affichait plus de 450 milliards de FCFA d’arriérés dûs aux entreprises locales sans parler de la méthode d’attribution des marchés publics,marché attribué à 90% de gré à gré selon les chiffres du Ministère de l’économie, alors que le code des marchés publics plafonne à 10% cette pratique de marché de gré à gré.

Le Fonds souverain, censé préparer l’avenir, a perdu près de 60 % de sa valeur en dix ans, faute de transparence et de gestion.

Le Gabon tourne en rond, dans un cycle d’annonces sans lendemain et finit par reculer dans la course des Nations.

Le mirage et bientôt la chute ?

Non, le Gabon ne deviendra pas Dubaï.

Parce que Dubaï a choisi la rigueur quand Libreville choisit le décor.

Parce Dubaï a misé sur le savoir quand au Gabon nous glorifions le pouvoir.

Parce que Dubaï a bâti un État quand nous entretenons au Gabon une image.

Sous Brice Oligui Nguema, le pays parle de transformation mais vit dans la régression. Un constat troublant : les autorités gabonaises s’enrichissent de manière ostentatoire là où le citoyen gabonais manque de tout, créant 2 types de gabonais ceux appartenant au pouvoir et ceux du bas n’ayant accès à rien, vivant dans la misère et la mendicité.

Et à force faire semblant de courir après un rêve qu’il ne comprend pas, le Gabon risque d’éveiller un autre spectre : celui d’Haïti, une Nation jadis pleine de promesses, “la petite perle de l’Amérique” ruinée par ses dirigeants, minée par ses illusions et vivant dans un présent extrêmement violent…

Par Nelly Matundu

@info241.com
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